Il a neigé la nuit dernière

Un album remarquable et magique, « Il a neigé la nuit dernière » est une expérience délicieuse qui mêle harmonieusement la photographie et l’illustration, réunissant ces deux formes d’art avec beaucoup de délicatesse, afin de raconter une histoire.

La ville est encore endormie. Tout est recouvert d’une couverture blanche.

(…) « Tout est immobile, même les bruits sont devenus invisibles. » `

Cette voix qui semble venir de l’extérieur, au loin, devient rapidement un protagoniste à la première personne qui nous guide dans l’histoire : « Il se fait tard et je dois sortir moi aussi. »

Les photos suivent ce que le protagoniste voit et pense : dans la maison, à travers la fenêtre, en regardant en bas, entre les voitures garées. Sur le pas de la porte, nous changeons de perspective et nous nous retrouvons sur le trottoir, avec les toits et les branches au-dessus et les empreintes de pas et les plaques d’égout en dessous.

C’est l’histoire d’un regard curieux qui découvre une ville toute neuve. Parfois silencieux et observateur, le regard suit l’apparition soudaine de lumières colorées ou de bruits de pas, puis à la page suivante, le regard voyage tranquillement ailleurs. D’autres fois, ce sont les mots qui nous guident : « Tant de créatures différentes habitent la ville, et chacune laisse sa marque ». L’originalité des traces de vélo ou les motifs complexes des pneus de voiture apparaissent presque comme de la dentelle. Les empreintes de pas, cachées ici et là dans la neige, révèlent la personnalité de chaque chaussure. « Les formes disparaissent… ou se transforment… » Les couleurs ressortent et attirent le regard vers elles. Des combinaisons et des souvenirs durables se forment : des feuilles brunes, comme le pelage d’un chien ; un miroir rond, comme un tronc coupé. Un sentiment d’enchantement flotte sur la ville et il semble presque qu’un cerf va apparaître, bondissant dans les rues, ou qu’un loup pâle et affamé va se promener dans le parc à chiens.

Les mots et les images jouent les uns avec les autres : Le protagoniste pense « jusqu’aux toits » et l’image s’envole immédiatement vers les cheminées, les branches lointaines et le toit des voitures.

La ville est pleine de tant d’histoires et chacune d’entre elles laisse une marque, ou l’absence d’une marque.

​En plus de raconter un voyage visuel et photographique cohérent et plein de surprises, Ninamasina ajoute sa propre personnalité à travers des illustrations délicates, en donnant de l’espace à l’imagination du protagoniste, en jouant avec la réalité et en ajoutant des détails simples et surprenants. La frontière entre la réalité et l’imagination s’estompe et devient impalpable. Les couleurs sont-elles vraiment réelles ? Est-ce vraiment ainsi qu’elles apparaissent en hiver ?

La promenade de la maison à l’école devient alors une aventure pleine de sensations et de découvertes ; l’absence de sons et de couleurs rend visible l’invisible, donnant vie à un monde qui ne peut apparaître, comme par magie, qu’avec la neige. Une histoire de détails perdus.

Un livre magnifique qui va bien au-delà d’un simple catalogue d’images splendides et disparates, les réunissant pour raconter une histoire accessible aux enfants dès l’âge de 3 ans. Offrez-leur le cadeau de l’émerveillement !

Description extraite de « Même les bruits sont devenus invisibles », par Maria Polita, dans Scaffale Basso (14.11.2017)